Mes recherches se développent au sein de différentes pratiques : croquis du modèle vivant, monotype, gravure et, au cœur de la matière, plâtre et pigment pur. Pour le plâtre je coule la matière liquide dans un caisson de bois, je la guide en douceur ou parfois la malmène, et lorsque je la sens prête à la gestation, je place à l’intérieur quelques déchets que le vent, la pluie et le feu n’ont pu complètement ingérer, et je laisse l’œuvre se faire.  De même, dans ce grand cocon crayeux, des métaux rouillés s’accrochent et accèdent à une vie indépendante, répandant leur oxydation au sein de la matière blanche et pure. Il me plaît de voir mon travail m’échapper, se poursuivre en dehors de moi. Alors parfois l’espace advient, se creuse ou se propulse, entraînant, à certains moments, des formes et des figures que j’avais à peine convoquées.

       Le pigment, lui, est poudreux, volatile, couleur et lumière. Il déploie sa vitalité propre que je voudrais capter sans capturer, comme on va à la chasse aux papillons sans formol ni épingles. Parfois je tente de jouer avec la gravité du temps et dans la rapidité du croquis je me sens libérée et je peux savourer les infimes inflexions de l’instant.